Alors pourquoi est-ce qu’on évite d’en parler comme si c’était une maladie honteuse ? C’est pas juste culturel. C’est un mélange explosif de croyances, d’éducation, de peur du jugement… et de pouvoir. On décortique tout ça.

L’origine du tabou sur l’argent : culture, religion et éducation

L’argent vu comme une source de péché

Pendant des siècles, en Europe surtout, l’argent a été lié à la morale et à la religion. Dans les traditions chrétiennes, on a souvent associé la richesse à la tentation, voire à la corruption. Gagner de l’argent ? OK, mais pas trop. Vouloir plus ? Suspect. En avoir beaucoup ? Forcément louche.

À l’inverse, la pauvreté a longtemps été valorisée. Elle était perçue comme un signe de sagesse, d’humilité. Résultat : on a cultivé l’idée que vouloir de l’argent, ou pire, en parler, c’était mal vu. Comme si l’argent salissait tout.

En gros, si t’as trop de thunes, t’es forcément un peu pourri. Et si t’en as pas, c’est que t’es pur, humble, vertueux. Ouais, logique bancale.

L’école, la maison… et le silence

Dans notre éducation, c’est pareil. Tu te souviens d’un cours sur comment gérer un budget ? Comprendre une fiche de paie ? Négocier un contrat ? Non. Parce que ça n’existe pas. On t’apprend à faire des multiplications, mais pas à comprendre ton compte en banque.

Et dans les familles, c’est souvent encore plus tabou. Tu demandes combien gagne papa ou maman ? Tu te prends un “ça ne te regarde pas” direct. C’est vu comme indiscret, malpoli, dérangeant.

À force d’entendre que c’est impoli, indiscret ou “ça ne se dit pas”, on intègre le truc. C’est automatique. L’argent devient un tabou, un sujet qu’on évite. Et ce tabou, il s’incruste.

Dans la société actuelle, le tabou reste bien ancré

La peur du jugement

Aujourd’hui encore, parler d’argent reste risqué. On a peur du regard des autres. Si tu gagnes peu, tu crains d’être vu comme “pas assez ambitieux” ou “pas au niveau”. Si tu gagnes beaucoup, tu risques d’être perçu comme prétentieux, matérialiste, voire “déconnecté de la réalité”.

Alors tu fais ce que tout le monde fait : tu te tais. Tu fais semblant. Et tu te compares. Le collègue qui part souvent en vacances ? Il doit gagner mieux. L’ami qui change d’appart ? Il doit avoir hérité. Mais tu n’en sais rien. Et ce flou alimente la frustration, la jalousie, l’angoisse.

Une question de pouvoir

L’argent permet de faire des choix. Choisir où tu vis, ce que tu manges, comment tu bosses. Il donne du confort, de la sécurité, du pouvoir. Et le pouvoir, en général, on ne le partage pas facilement.

Les personnes à l’aise financièrement évitent souvent de parler argent. Pour ne pas déranger, ou pour ne pas dévoiler leur "position". Et celles qui galèrent ? Elles se taisent aussi. Par honte, par peur, par fatigue. Résultat : le silence profite à ceux qui ont déjà plus. Et les inégalités continuent de grandir dans l’ombre.

Ce déséquilibre renforce les inégalités. Car tant que personne ne sait combien gagne l’autre, il est difficile de savoir si on est payé à sa juste valeur. Ou si une opportunité nous échappe. Ou si on pourrait faire autrement.

Quand parler d'argent devient impossible : le tabou des galères financières

Une société du paraître

On vit dans une société où tout se montre. Réussir, c’est afficher. Sur les réseaux, on exhibe les voyages, les projets, les réussites. La galère, elle, reste bien planquée. Dire qu’on a du mal à finir le mois, qu’on galère à payer un loyer ou qu’on a perdu son job ? C’est vu comme une faiblesse. Une faute presque. Alors on garde ça pour soi.

L’argent est devenu un marqueur de réussite visible. Il faut "réussir", "être libre", "vivre ses rêves" et le montrer. Alors quand on a du mal à finir le mois, à payer un loyer ou qu’on perd son emploi… on se tait.

La honte et la solitude

Avoir des problèmes d’argent, ce n’est pas juste une situation. C’est souvent vécu comme un échec personnel. Tu te dis que t’as mal géré, que t’es mauvais, que tu mérites ce qui t’arrive. Comme si les difficultés financières étaient toujours une question de faute, jamais de contexte ou de système injuste.

Tu veux pas en parler à tes proches pour ne pas les inquiéter. Tu veux pas passer pour “le pauvre” de la bande. Alors tu te tais. Et à force de ne pas en parler, tu garde tout pour toi. Ce silence isole, alimente la culpabilité, et parfois empêche même de demander de l’aide. C’est un cercle vicieux.

À la maison, un sujet encore plus tabou

Pourquoi on ne parle pas des galères financières dans les familles ? Peut-être parce que ça bouscule l’image du "parent protecteur", du "père qui assure", ou du "couple soudé". Combien de personnes cachent à leur conjoint qu’elles ont perdu leur job ? Qu’elles sont à découvert ? Qu’elles jonglent pour payer les factures ?

Dans beaucoup de foyers, l’argent est soit géré par une seule personne, soit éclaté, flou, implicite. Résultat : quand ça déraille, on se tait. Par peur de créer un conflit, de décevoir, ou de perdre l’estime de l’autre.

Ce silence est dangereux

Ne pas parler d’argent, c’est ne pas parler des problèmes d’argent. Et ne pas parler des problèmes d’argent, c’est laisser ces problèmes grandir en silence, nourrir l’angoisse, créer des tensions invisibles.

Ce silence empêche d’anticiper. Il empêche de se serrer les coudes. Il empêche de chercher ensemble des solutions. Et il alimente un mythe : celui que tout le monde gère, sauf toi.

Les effets concrets de ce tabou dans la vie quotidienne

L’opacité des salaires

Tu sais combien gagne ton collègue à poste égal ? Non ? C’est normal, personne ne le dit. Pourtant, dans les pays où les salaires sont plus transparents, les écarts se réduisent. Le tabou sur l’argent protège souvent ceux qui en ont le plus, et enferme les autres dans l’ignorance.

68%
des salarié·e·s considèrent le montant des rémunérations comme un sujet tabou dans leur entreprise
Source : IFOP 2023

Le stress et l’isolement

Quand tu galères et que tu ne peux en parler à personne, tu portes tout. Le stress, la culpabilité, les insomnies. Tu te dis que t’es seul à ne pas y arriver. Que les autres gèrent mieux. C’est faux. Mais comme personne ne parle, tu crois que c’est toi le problème.

L’impossibilité de s’entraider

Tu sais combien de gens passent à côté d’aides, de bons plans, d’opportunités… juste parce qu’ils ne savent pas que ça existe ? Parce que personne n’en parle ? C’est un vrai frein. Et ça nous maintient, collectivement, dans une forme d’impuissance.

Et si on osait en parler ? Vers une relation plus saine à l’argent

Commencer par se poser les bonnes questions

Changer son rapport à l’argent commence souvent par un petit pas intérieur. Pourquoi tu n’es pas à l’aise avec ce sujet ? Qu’est-ce que t’as entendu petit sur l’argent ? “Faut pas en parler”, “L’argent ne fait pas le bonheur”, “On n’est pas riches mais on a de la dignité”... Ces phrases-là, elles restent ancrées. Et parfois, elles nous freinent.

Ce travail de réflexion, on peut le faire seul. Ou mieux, accompagné. Les ateliers Malo sont justement là pour ça : t’aider à mettre des mots sur ce que tu ressens. Repenser ton rapport à l’argent. Sans pression, sans jugement, avec des outils simples et concrets.

Créer des espaces de parole

En parler, oui, mais pas avec n’importe qui, ni n’importe comment. Il s’agit d’ouvrir la parole dans un cadre bienveillant, entre personnes prêtes à écouter et à partager. Ça peut être un groupe d’amis, un cercle de parole, un coach, ou une communauté comme celle de Malo.

Dans ces espaces, on apprend à mettre des mots sur ce qu’on ressent, à poser des questions, à écouter sans comparer. Et peu à peu, le tabou recule.

Repenser l’argent comme un outil, pas une identité

Ce que tu gagnes ne dit rien de qui tu es. L’argent, c’est un outil. Il t’aide à faire des choix, à vivre, à construire. Mais il ne résume pas ta valeur. Et tant qu’on confondra les deux, on n’arrivera pas à en parler sereinement.

Petit exercice à faire maintenant

Prends une feuille. Écris les trois phrases que tu as le plus entendues à propos de l’argent dans ton enfance. Ensuite, demande-toi : est-ce qu’elles m’aident aujourd’hui ou est-ce qu’elles me freinent ?

En résumé

L’argent est tabou parce qu’on l’a associé à la morale, à la honte, au pouvoir. Ce silence a des conséquences concrètes : stress, inégalités, isolement. Mais ce tabou n’est pas une fatalité. On peut apprendre à en parler autrement, avec simplicité et bienveillance. On peut revisiter ses croyances, créer des espaces de dialogue, et surtout se rappeler que l’argent n’est qu’un outil. Il ne dit rien de ta valeur.

Tu veux aller plus loin ? Rejoins un atelier Malo et commence à parler d’argent autrement. Pour toi, pour les autres, pour créer une société plus juste et plus apaisée.